samedi 16 novembre 2013
Des documents subtilisés par Jeremy Hammond à l’entreprise Stratfor avaient prouvé l’implication de la société dans la surveillance d’activistes.
Jeremy Hammond, un hacker affilié aux Anonymous, a été reconnu coupable par la justice américaine d’avoir mis la main sur des millions de communications internes de la firme de renseignement Strategic Forecasting, Inc – plus couramment appelée Stratfor – et d’avoir dérobé les coordonnées bancaires de 860 000 de ses clients. A ce titre, il a été condamné vendredi 15 novembre à dix ans de prison, le maximum encouru, dans la mesure où il avait plaidé coupable au printemps dernier.
Les messages internes de Stratfor, une entreprise installée au Texas et spécialisée dans le renseignement, avaient été ensuite fournis à WikiLeaks par les Anonymous et publiés par le site en février 2012, en partenariat avec des dizaines de médias du monde entier. Plusieurs informations sont issues de ces documents, notamment la surveillance par Stratfor de militants écologistes à Bhopal, en Inde, mais aussi des activistes d’Occupy Wall Street ou de PETA, l’organisation de défense des animaux.
Les détails bancaires des clients de l’entreprise ont quant à eux été utilisés pour effectuer plus de 700 000 dollars de dons à des ONG.
Actif au sein de LulzSec, une émanation des Anonymous, M. Hammond, qui était parvenu à pénétrer dans les serveurs de l’entreprise américaine, a été arrêté le 5 mars 2012, grâce aux informations fournies par "Sabu", la taupe du FBI au sein des Anonymous.
M. Hammond est condamné en vertu des loi américaines antipiratage controversées, jugées par beaucoup comme extrêmement sévères car assorties de longues peines de prison ferme. En Grande-Bretagne, des membres de LulzSec ont également été condamnés à des peines bien plus courtes dans le cadre de l’affaire Stratfor – quinze mois de détention au maximum.
Au printemps dernier, Jeremy Hammond était revenu sur ses actions : "J’ai agi de la sorte car je pense que les gens ont le droit de savoir ce que les gouvernements et les entreprises font derrière des portes fermées. J’ai fait ce que je pensais juste." De fait, son procès a été l’occasion de relancer le débat sur les lanceurs d’alerte, ces activistes qui font "fuiter" des informations d’intérêt public, particulièrement visés depuis l’arrivée au pouvoir de l’administration Obama.
"Ils ont été très clairs : ils essaient d’envoyer un message à ceux qui voudraient m’imiter. Cela s’explique notamment parce qu’ils ont été ridiculisés, embarrassés par les Anonymous, et ils ont besoin de sauver la face", déclarait-il au Guardian la veille de sa condamnation.
Le procès a également été entaché de soupçons de conflit d’intérêt : le mari de la juge chargée du dossier, Loretta A. Preska, était directement concerné par les courriels de Stratfor publiés par WikiLeaks, puisqu’il est employé par un cabinet d’avocats travaillant en étroite collaboration avec Stratfor.