28 mars 2018 00:00
Sommes-nous condamnés à lâcher nos données personnelles ?
Fabienne Sintes productrice de l’émission « Le téléphone sonne »
Nous avons tous collectivement trouvé ça d’abord ludique, les réseaux sociaux, Facebook en tête, puisque tout de suite il a séduit la planète entière. On y trouvait des amis, on y racontait les petites banalités de la vie, on y partageait quelques photos et puis des opinions et puis des liens et puis on nous a parlé des algorithmes qui vous connaissent mieux que vous-même, des pubs ciblées dès que vous allez sur un site ou sur un autre. Bref, nous avons fini par réaliser, au fil du temps, que nous laissions des petits bouts de nous-même sans trop savoir où, mais que d’autres savent très bien s’en servir.
À un moment ou à un autre nous sommes devenus des fichés volontaires et aujourd’hui tout cela prend des proportions énormes, avec une accélération vertigineuse, peut-être, ces derniers mois : les fake news, la campagne américaine, l’ingérence russe.
Les données qu’a collectées Cambridge Analytica sont probablement dans les mains d’énormément d’autres applications qui, de la même façon, ont collecté autant d’informations si ce n’est plus, parce que Facebook, depuis le début, permet ça.
Il n’y a pas du tout un détournement de Facebook, il n’y a pas du tout quelque chose qui échapperait aux mains de Facebook. Facebook est très clair dans ses conditions générales d’utilisation : elles permettent aux applications que vous utilisez d’accéder aux like de vos amis.
Fabienne Sintes : Les journalistes, par exemple, qui ont fait des papiers sur Cambridge Analytica, en ont vu certaines de ces données. Est-ce que ça veut dire que ça fonctionne comme lorsque vous donnez votre numéro de téléphone une fois, à l’ancienne, et qu’il se retrouve après dans des publicités ici et là avec des gens qui vous appellent. Elles sont déjà partout ces 50 millions de données ? Ou pas ?
Giuseppe de Martino : C’est le risque. Vous avez eu la très bonne expression : les usagers de ces services se transforment en fichés volontaires. Il n’y a pas eu de vol. C’est vraiment chaque utilisateur qui a donné sciemment des informations qu’il a partagées volontairement et, au fil de l’eau, toutes ces informations continuent à se diffuser de la manière la plus large possible. On revient donc au point de départ : c’est comment empêcher de se transformer en fiché volontaire ?
Les invités :
— Arthur Messaud - Juriste pour la Quadrature du Net,
— Giuseppe de Martino - Fondateur de Loopsider, média en ligne et président de l’ASIC,
— Gwendal Le Grand - Directeur des technologies et de l’innovation à la CNIL.
— France Inter - Le téléphone sonne.