mercredi 13 mai 2015
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Il y a de bonnes raisons de craindre que la conclusion des négociations entre l’Union Européenne et les États-Unis pour un « partenariat » transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI ou TAFTA) conduise à un affaiblissement de la démocratie et des normes qui nous protègent. Les garde-fous dans tout une série de domaines pourraient être menacés par ce traité, par exemple les contrôles qui nous protègent des produits chimiques toxiques ou d’une alimentation malsaine ; de la pression à la baisse sur les salaires ou encore de la spéculation sauvage des banques.
Le TAFTA pourrait également transformer la forme et le rôle de nos institutions politiques, et en particulier la garantie qu’elles rendent des comptes aux citoyen-nes sur les décisions qu’elles prennent.
A cet égard, la proposition de "coopération réglementaire" dans le cadre du TAFTA est particulièrement préoccupante. Il s’agit d’un plan hautement stratégique qui vise à permettre un accord sur certains des aspects les plus controversés du TAFTA, après la finalisation du traité, et une fois que l’attention publique sera détournée. Discussions opaques et accords d’arrière-chambres seraient conclus dans les années à venir, après l’adoption du TAFTA. Cette proposition donnerait aux groupes de pression des grandes entreprises une incroyable marge de manœuvre pour influencer le processus de prise de décision, en affaiblissant le droit de regard citoyen sur les décisions prises.
En effet, ce processus se déroulera en dehors des circuits habituels de prise de décision démocratique des deux côtés de l’Atlantique, empêchant les parlements nationaux et les conseils régionaux et locaux d’être pleinement impliqués et interdisant ainsi dangereusement le débat public.
De bonnes idées de réglementations dans l’intérêt général pourraient être stoppées avant même d’être discutées par une assemblée d’élu-es.
A l’inverse, des idées favorisant de puissants intérêts commerciaux pourraient être présentées pour adoption comme telles, sans marge de manœuvre pour les modifier, sur la base d’un accord préalable entre groupes de pression, autorités de l’UE et des États-Unis et un groupe restreint d’officiels n’ayant aucun compte à rendre. En d’autres termes, la coopération réglementaire pourrait sérieusement affaiblir le contrôle démocratique des lois à venir.
La proposition ambitieuse de l’UE sur la coopération réglementaire montre que les institutions politiques actuelles et notre système réglementaire sont en jeu dans le cadre des négociations entre l’UE et les États-Unis. La coopération réglementaire constitue un exemple supplémentaire de la scandaleuse capture des négociations du TAFTA par les grandes entreprises.
Elle est particulièrement dangereuse car elle vise à réduire davantage le droit de regard public sur politique commerciale de l’UE, alors que celle-ci est déjà très opaque.
Nous sommes témoins d’une tentative de repousser les questions les plus critiques et controversées du TAFTA à des discussions qui auront lieu après la conclusion de l’accord, et ce tout en assurant un cadre institutionnel qui accorde aux lobbyistes des grandes entreprises un accès privilégié aux législations à venir.
Il est grand temps de mettre fin à cette attaque contre la démocratie et de nous assurer du maintien d’un contrôle démocratique sur les processus de règlementation, dans l’intérêt général.
Plus les gens découvrent ce qui est en jeu avec le TAFTA, plus ce projet d’accord devient impopulaire, puisqu’ils comprennent en effet qu’ils ont potentiellement beaucoup à perdre. Les parlements nationaux tout comme les autorités locales et régionales remettent également de plus en plus en question le processus de négociation, ainsi que ses objectifs et ses propositions. Il y a notamment une forte résistance contre toute tentative d’abaissement des normes dans des domaines tels que l’alimentation ou les produits chimiques.